En roulant sur la nationale qui le ramène chez-lui, un vendeur de gadgets aperçoît une pancarte "Soisson, foire aux haricots".
- Tiens, Moi qui adore les haricots, se dit-il, je m'arrêterai bien ... Ma femme ne m'en a jamais fait, bien qu'elle m'ait toujours promis de me préparer le fameux cassoulet dont sa mère lui avait appris la recette. Il est 13h, j'ai faim ...Bon, j'vais y faire un tour !
Il gare donc sa voiture au parking de la foire où la foule se presse au milieu des flonflons, des échoppes, des cuisines roulantes, des marchands de vin et de produits régionaux ...
- Approchez, approchez, crient les marchands. Venez goûter mon flageolet, venez déguster le vrai cassoulait toulousain, le lingot suisse, appelé aussi "Musicien des grisons" ...
Notre vendeur n'en croit ni ses yeux, ni ses oreilles. Il se jette littéralement sur les haricots et en mange jusqu'à plus faim. Après plus d'une heure de goinfrerie, il remonte en voiture et reprend la route. Hélas, au bout de 10 km, quelques joyeuses flatulences l'obligente à ouvrir une vitre, puis deux, et même à rouler avec la tête en dehors tant les effets des harciots se font sentir ...
Après l'enfer de cette route interminable, il arrive enfin à Paris, en pleine nuit (normal : on ne conduit pas très vite avec les portes grandes ouvertes). Il gare sa voiture près de chez-lui, sort le plus discrètement possible, regarde autour de lui, remarque qu'il n'y a personne et lâche donc un coup de corne cassoulesque qui rappelle, à s'y méprendre, le klaxon d'un semi-remorque.
Il pénètre dans son immeuble, monte dans l'ascenseur, appuie sur le bouton de l'étage qu'il habite. L'ascenceur démarre. Arrivé à son étage, il sort, tout suffocant, et renvoie hypocritement l'ascenseur au rez-de-chaussée, pour que personne ne sâche jamais à quel étage s'est arrêté l'immonde parfumeur nocturne.
Arrivé devant chez-lui, il se rend compte qu'il a oublié ses clés, et est obligé de sonner ... Sa femme ouvre la porte,la refermant à moitié derrière-elle, et sort sur le palier.
- Bonsoir mon chéri, dit-elle en l'embrassant avec malice.
- Je peux rentrer ? demande le vendeur, qu'un gargouillement intestinal prévient de l'évacuation prochaine d'une nouvelle harmonie gazeuse.
- Pas tout de suite : je t'ai préparé une surprise !
Il blêmit.
- Donne-moi ta cravate, continue sa femme, je vais te bander les yeux, et lorsque tu seras assis à la table de la salle à manger, je t'enlèverai ton bandeau.
Notre sympathique et flatulant VRP s'execute, et sa femme l'emmène s'asseoir à l'aveuglette dans la salle à manger. Soudain, le téléphone sonne.
- Ah ! Mais qui peux bien appeller à cette heure-ci ? demande-t-elle. Je vais répondre, chéri, mais surtout, n'enlève pas ton bandeau ! Je tiens à te faire découvrir la surprise par moi-même.
Elle court dans l'entrée pour répondre au téléphone. Pendant ce temps, son mari souffre le martyr ... La conversation de sa femme ayant l'air de se prolonger, il en profite. Tout en s'eventant à l'aide de sa malette, il interprète avec talent et virtuosité une vlase qui aurait pu rester dans les annales. Sa femme finissant sa conversation, il est obligé d'interrompre son concert.
- Tu n'as pas touché à ton bandeau ? demande-t-elle.
- Non non.
- Bon, à trois je te l'enlève, un, deux, tr...
DRING DRING !
- Ah, mais c'est pas vrai, ils se sont donné le mot aujourd'hui ! Je vais répondre chéri, ne touche pas à ton bandeau !
- C'est la fin des haricots, se dit le vendeur qui regrette sa gourmandise.
Tandis que se femme se retrouve en pleine discussion avec le concierge, il continue donc sa symphonie olfactive. Heureusement, lorsque la porte se referme enfin, la dernière note du final retentit.
- Cette fois, rien ne pourra m'emopêcher de te retirer ton bandeau ! Un, deux, trois !
Elle enlève le bandeau, et son mari découvre avec horreur 15 copains autour de la table devant une assiette de cassoulet, et qui chantent le nez bouché "Happy birthday to you, happy birthday to you !..."